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Le Républicain Lorrain - « Les enfants un outil de conflit »

Rédigé le Samedi 3 Février 2018 à 09:58 | Lu 639 fois


M e Dalbin, du barreau de Metz, ne croit pas au divorce pacifié sans un travail en profondeur des parents. La santé des enfants en dépend.


M e Agnès Dalbin, avocate au barreau de Metz, s’est forgée une conviction après trente années à plaider des affaires familiales : «  Un divorce réussi se bâtit autour de l’enfant ». Ce qui, en théorie, semble une évidence et dans la réalité une véritable gageure. Le plus souvent, en effet, «  l’enfant est un outil de conflit » dans la séparation d’un couple qu’il soit marié, Pacsé ou sans statut particulier. La conviction que s’est forgée l’avocate messine auteur d’un livre sur le sujet*, est «  que le divorce pacifié d’emblée n’existe pas », ou bien c’est une illusion. Elle reste marquée par l’histoire de cette femme et de cet homme séparés depuis quinze ans et ayant, depuis, refait leurs vies dans une apparente sérénité. Après toutes ces années, ils décident de divorcer pour de simples raisons administratives. Dans le bureau, la formalité se mue en drame. «  La femme s’est effondrée, disant qu’elle ne pourrait jamais divorcer, que c’est trop dur », se souvient M e Dalbin.

Thérapeute de l’adulte

Cette dernière ne croit guère au «  consentement mutuel » : «  Celui des parents qui n’est pas à l’initiative du divorce souffre le plus et l’enfant, naturellement se tourne vers celui qui souffre le plus, il devient thérapeute de l’adulte ». Pour l’enfant, la situation devient inextricable quand «  les parents ne se parlent plus » ou pire «  quand l’un dénigre l’autre ». «  L’enfant ne peut pas prendre partie, c’est impossible et il est prêt à tout pour que ses parents se parlent, à tomber malade, à ne plus travailler à l’école… », martèle l’avocate. Elle met à mal une autre idée reçue qui veut que «  les enfants préfèrent vivre avec des parents séparés plutôt qu’avec des parents qui ne s’entendent plus ». «  À 99 %, ils préfèrent rester avec leurs parents, même si cela ne va plus entre eux », assure M e Dalbin.
Par ailleurs, plus les enfants sont grands lors de la séparation plus «  ils ont du mal à l’accepter » car, poursuit l’avocate «  les adolescents ou jeunes adultes ont le sentiment qu’on leur vole leur enfance, qu’on les prive de ce schéma avec lequel ils se sont construits ».
En trente années de pratique, elle considère que la prise en compte des enfants dans les procédures a très peu progressée.
Dès 10 ans à Metz, l’âge de discernement varie d’un tribunal à l’autre, ils peuvent, s’ils le souhaitent, être entendus en présence ou non d’un avocat Mais le juge leur explique d’emblée que la décision ne dépendra pas de ce qu’il dit, mais de ce qu’on estime être son intérêt. M e Agnès Dalbin vante,en revanche, les vertus de la médiation qui s’organise hors cadre judiciaire. Elle permet «  de dépolluer les ressentis, de lever les malentendus, d’accepter la décision de l’autre, de remplacer, en fait, le couple conjugal par le couple parental ». «  On n’est plus marié mais on est des parents », résume M e Agnès Dalbin. Alors, les adultes pacifiés, peuvent enfin penser aux enfants.